15 mars 2011

Une expérience

Cette semaine, je dois rendre une rédaction dans la langue que j'apprends en cours du soir à la fac, ayant pour sujet une "expérience personnelle", une "première fois".

Etrangement, la première chose qui m'est venue à l'esprit est la première (et seule) fois où je suis entré au Gym Louvre à Paris. J'ai également pensé à ma première séance de cinéma un peu crapuleuse au Mk2 Bibliothèque. Et à ma première rencontre avec au pied la pyramide du Louvre: son physique plus charpenté que je ne l'imaginais, la profondeur du bleu de ses yeux, la naïveté et la toute-puissance de son sourire. La première fois qu'il a pris le train pour me rejoindre dans ma ville moyenne de province.

Ce sont des souvenirs précis, dont je garde des émotions vives: un bon sujet de rédaction dans l'absolu. Mais faire une rédaction dans une langue étrangère est un exercice de langue parfaitement calibré, aussi ai-je décidé de m'en tenir à une première fois plus "académique". En fouillant un peu dans ma mémoire, je me suis souvenu de mon premier mini-concert au piano devant des inconnus. Je crois qu'ils appelaient ça un "goûter" au conservatoire. Sans doute pour dédramatiser...

Je n'ai pas "fait le conservatoire", je m'y suis simplement inscrit comme adulte débutant et j'y ai suivi des cours pendant deux ans. Ma prof de piano était très tactile quand j'y repense; ça me surprenait beaucoup moi qui suis assez farouche lorsqu'on m'approche de trop près. Mais elle me massait les épaules, me prenait énergiquement les bras, comme si j'étais une poupée de chiffon. Elle le faisait avec un tel naturel que je n'aurais pas eu l'idée de protester. Après six mois d'apprentissage, elle a voulu pousser le niais oisillon hors du nid à l'occasion de ce fameux goûter-concert. Evidemment, J'ai beaucoup répété mon morceau et je le jouais d'ailleurs plutôt bien. Enfin, tout seul chez moi quoi. Mais le jour de la représentation, vers le milieu de la partition, ma main gauche s'est arrêtée de jouer: elle ne savait plus où elle était, ni ce qu'elle faisait dans cette galère. C'est donc la droite qui a pris les commandes - toute allusion politique est fortuite - et a essayé de sauvé les meubles. Il s'en est suivi un petit flottement dans l'auditoire, composé de jeunes et moins jeunes musiciens, où une prestation ratée n'a aucune chance de faire illusion. C'est dans ces moments-là qu'on voudrait rapetisser très vite jusqu'à disparaître dans les aspérités de la moquette.

Voici donc un sujet de rédaction beaucoup plus passe-partout.

Au fait, le morceau que j'ai raté c'est Green leaves:




Sans être synesthète, je ne l'entends plus que d'une main...

5 commentaires:

  1. Pourquoi faut-il toujours que l'on pousse les apprentis musiciens à jouer en public ? Ne peut-on pas admettre que certains apprennent pour leur seul plaisir personnel ? Je n'aurais guère aimé être à ta place...

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  2. Mais moi c'est l'autre sujet qui m'intéresse... Penses-tu nous le raconter un de ces jours ?

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  3. @Glimpse: D'après ce que j'ai cru comprendre, "ça ne rigole pas" dans les conservatoires. Si on n'est pas sérieux, on se fait gentillement conseiller de prendre des cours privés...

    @Ek91: Je n'y avais pas réfléchi mais pourquoi pas. J'ai juste besoin d'un prétexte ;)

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  4. Les conservatoires sont des usines à fabriquer des musiciens professionnels qui vont ensuite se produire en public. Cela n'est pas sans conséquence sur leur mode de fonctionnement : marche ou crève !
    Comme Ek91, l'autre sujet m'intéresse aussi beaucoup. Je parle de l'épisode pyramide du Louvre, pas du Mk2 :)

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  5. @TM: Je vais finir par céder sous la pression ;)

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